Commune de Machilly

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DISCOURS DU 8 MAI 2024

Mesdames et messieurs,

Bonjour et bienvenue à la cérémonie de la commémoration de l’armistice du 8 mai 1945, en présence de notre Conseil Municipal des Jeunes, de l’harmonie municipale de Machilly/Saint-Cergues et des élèves de l’école primaire de Machilly.

Après cette représentation de la troupe costumée en habits militaires d’époque (Association Passion Patrimoine Gessien + Association Histoire & Mémoire Militaire Alpine) qui nous a plongés dans l’ambiance de cette commémoration, 79 ans après l’armistice, nous commençons la cérémonie par :

L’hommage aux morts,
La lecture du mot de Sébastien Lecornu, ministre des Armées, et de Mme Patricia Mirallès, secrétaire d’État aux Anciens Combattants et à la Mémoire.

Je remercie les jeunes du village ici présents, avec l’école, ainsi que les candidats au nouveau CMJ, d’être avec nous et de continuer à porter la mémoire, afin de nous rappeler pourquoi nous nous rassemblons aujourd’hui :
Au-delà des morts, au-delà de l’Histoire écrite par le courage des hommes et des femmes durant ces six années d’abnégation, cette guerre a aussi été porteuse d’une bataille qui ne s’est pas seulement construite par les faits d’armes de nos militaires, mais aussi par l’engagement des civils, hommes et femmes. Certains pour reconquérir leur territoire sous un joug étranger, mais à partir des années 40, un autre combat, plus sombre, se jouait : celui de sauver des personnes pourchassées en raison de leur religion, de leur choix de vie ou de leur origine.

La Seconde Guerre mondiale reste ainsi un symbole important de notre territoire. Elle a forgé l’identité de ces lieux dans la mémoire collective, ses événements et ses héros locaux et nationaux sont célébrés et remémorés dans des chemins de mémoire, des expositions, des ouvrages, et bientôt dans Annemasse Agglo, un parcours de la mémoire à travers nos 12 communes. Car ici, la mémoire est prégnante dans l’histoire de nos familles, de nos lieux de vie, et nous en sommes fiers. Les Résistants et Justes que nous célébrons nationalement sont des locaux. Partout dans les environs, des lieux dédiés aujourd’hui jalonnent notre territoire, d’Étrembières à Annemasse, à Ville-la-Grand, à Saint-Cergues, et ici à Machilly, le chemin Michel Hollard et l’hostellerie savoyarde, lieu de combat pour la libération de Machilly et du Chablais, dont nous fêterons les 80 ans cette année, lors d’une cérémonie particulière en commun avec Saint-Cergues.

Ces lieux sont le témoignage de ce combat mené par des gens ordinaires, des gens d’ici, dans leur quotidien, devenus extraordinaires, et qui nous rappellent la valeur de la vie humaine. Ils nous rappellent que, grâce aux engagements civiques, chacun peut sauver une vie.
Mais les souvenirs s’estompent, et les traumatismes de la guerre du quotidien aussi. Aujourd’hui, nos regards sont tournés vers Israël et la Palestine, ainsi que l’Ukraine et la Russie, sur notre continent, alors qu’à nouveau, des familles sont déchirées, que des combattants, militaires et civils, où même parfois nous ne faisons plus la différence entre les deux, tombent chaque jour, et que le nombre de morts ne cesse d’augmenter… Aujourd’hui encore, au XXIe siècle, alors qu’au fil des décennies qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale, nous pensions avoir appris à dire « plus jamais ça », à ne plus accepter le décompte terrible des morts, qu’ils soient militaires ou civils, et pourtant nous voilà à nouveau suspendus aux efforts diplomatiques pour éviter que le conflit entre Israël et la Palestine ne prenne une ampleur plus large, menaçant de s’étendre à l’Iran, tout en espérant que le conflit ukrainien, qui dure déjà depuis plus de deux ans (804 jours), trouve une résolution.

Il y a 79 ans, se terminait un conflit durant lequel trop de morts ont été sacrifiés pour les ambitions d’un homme, qui, profitant d’une crise économique et sociale, a exacerbé les divisions existantes dans une société, autour de la haine de l’autre, du mépris de l’autre, de la jalousie, du refus des diversités d’opinion, religieuse et culturelle. L’humanité oublie les leçons du passé acquises dans la souffrance : il n’y a pas de guerre juste, mais il y a des causes justes, des causes pour la liberté et la paix, où les batailles doivent être portées par une solidarité plus forte que toutes les haines qui peuvent nous diviser.

J’aimerais partager avec vous deux extraits de poèmes ukrainiens de Serhiy Zhadan relatant les horreurs de la guerre et de l’exil pour de trop nombreuses personnes. Ils n’ont pas été écrits il y a 79 ans, mais bien récemment, et décrivent des situations qui ne peuvent que nous remémorer ces moments sombres de notre histoire :

Extrait 1 :

Noir convoi, nuée de corbeaux, d’où viens-tu ?
Nous sommes aumôniers, habitants d’une ville qui n’est plus,
Venus apporter ici la fatigue et la docilité.
Dis à tes tiens qu’il n’y a plus personne sur qui tirer.
Notre ville était de pierre et d’acier.
Il ne nous reste que nos valises à porter,
Avec dedans des cendres sous les tirs amassées.
Maintenant même nos rêves sentent le brûlé.

Extrait 2 :

Il nous faudra courir à travers la nuit et les tournesols,
Fuir les chiens, dormir parmi les bêtes, à même le sol,
Nous devrons recueillir l’eau des pluies, attendre dans les camps,
Provoquer les dragons sur les drapeaux dans les champs.
Les amis ne reviendront pas, tu n’emprunteras plus ce sentier,
Il n’y aura plus de cuisines enfumées ni de travail coutumier.
Il n’y aura plus de lumière dans les pièces délaissées,
Plus de plaines vertes ni d’espaces désertés.
Il y aura […]
Le silence des cimetières, le bruit des kommandanturs,
Les listes des morts, imprimées sans vérifier l’écriture,
Si longues que l’on n’a pas le temps
De chercher chaque matin son nom là-dedans.

Extraits de D’où viens-tu, convoi noir, nuée de corbeaux ? et de Nous sommes des réfugiés, toi et moi
Traduits par Iryna Dmytrychyn

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